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  • Photo du rédacteurCélia Couleaud

Municipales : le casse-tête des communes sans candidats

Dernière mise à jour : 4 févr. 2022

Cette année, à la veille des élections municipales, 106 communes françaises se retrouvent sans candidat. C’est le cas de la petite commune d’Esteil (56 habitants) dans le Puy-de-Dôme en Auvergne. Lorsqu’aucune liste électorale n’est proposée, c’est toute la vie du village qui est mise en péril. Plusieurs scénarios sont possibles.


Dans le petit village d’Esteil, commune perchée au-dessus du bassin d’Issoire (63), le maire sortant, Serge Hercegfi ne se représente pas. Jusque-là, rien d’anormal. Une étude de novembre 2018, menée par l’Association des maires de France (AMF) et le Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF), indique même qu’à un an et demi des élections, déjà 49% des maires et mairesses interrogé.e.s ne souhaitaient pas se représenter, ni en tant que maire.sse, ni en tant qu’adjoint.e ou conseiller.e.




Mais le cas d’Esteil est plus rare et compliqué que cela. A deux jours maintenant du premier tour des élections municipales (qui aura lieu ce dimanche 15 mars), aucun.e des 56 habitant.e.s de la commune ne se présente à la succession de leur maire. La grande mairie du village pourrait bien être laissée à l’abandon par ses villageois. Pourtant, dans une commune de cette taille, seulement 9 noms sont nécessaires pour constituer une liste. Pour le maire actuel, la commune pourrait éviter de passer par toutes ces complications : « Je ne suis pas le seul dans la commune a être capable d’avoir les fonctions de maire. Il y a des jeunes qui se sont installés sur la commune, il faudrait qu’ils prennent leur destin en main et qu’ils s’occupent des affaires de la commune ». A cela, il ajoute cependant qu’il ne veut pousser personne à prendre sa suite.

Ce manque de candidat dans les communes est assez récent : cette année, 106 communes n’ont pas de candidats en France, dont sept en Auvergne. Mais en 2014, au même stade, seulement 64 communes étaient dépourvues de candidats.




Les maires, ça ne court plus les rues

Dans un article datant des dernières municipales en 2014, Le Parisien expliquait que l’écharpe de maire était « de plus en plus lourde à porter ». Le journaliste soulevait deux principales raisons à ce phénomène : « une crise des vocations et de nouvelles règles éditoriales ». Il expliquait alors que le respect de la parité dans les listes, l’obligation de se déclarer candidat en préfecture, etc. repoussaient les potentiel.le.s candidat.e.s.

Mais pour le maire d’Esteil, Serge Hercegfi, d’autres problématiques s’ajoutent.

Ce malheureux manque de candidats s’observe surtout dans les petites communes. Quatre communes de plus de 1000 habitants sont concernées par ce problème cette année. En 2014, il n’y en avait qu’une seule.

Pour le maire d’Esteil, à cause du trop petit budget et du manque de personnel, « il est plus compliqué d’œuvrer dans une petite commune que dans une grande ». Et en plus de l’aspect économique, une petite commune a moins de poids dans les débats intercommunaux. Pour Serge Hercegfi la situation d’Esteil, comme de toutes les autres communes de cette taille, est triste mais bien réelle : « On n’a plus de prérogatives, il nous reste le sale boulot, on va dire… » Et ça, ses habitants en ont bien conscience aussi. D’après leur maire, ce pourrait même être l’une des causes de cette désertification : « ils ne veulent pas s’embarrasser très certainement ».

Marie-José est une habitante de l’une des quelques maisons de pierres qui forment le village d’Esteil. Pour elle être maire implique trop de responsabilités. « Mais si on me demandait d’être sur une liste, je ne dirais pas non » suggère-t-elle.


Des solutions au cas par cas

La première solution à laquelle certains pourraient penser pour résoudre ce manque de candidat est le « panachage ». Cette technique consistant à ajouter des noms à une liste était autorisée il y a encore quelques années dans les communes de moins de 1000 habitants, mais elle est maintenant en partie révolue. Les électeurs peuvent encore remplacer des noms de candidats par ceux d’autres candidats, mais les noms ajoutés, de personnes non-candidates, ne seront pas pris en compte.

Consultez le guide des élections municipales 2020 ainsi que tous les changements législatifs ici.


Les solutions se feront plutôt par étapes clé :


« J’ai 61 ans, j’ai donné, j’arrête. »

Serge Hercegfi ne souhaitait pas voir arriver ce destin pour sa commune. Les maires qui reprennent leur propre succession sont très nombreux, mais pour lui son rôle n’est plus à la mairie. « Je suis au Conseil municipal depuis 1998 exactement, et j’estime que j’ai fait mon temps. J’ai 61 ans, j’ai donné, j’arrête. », déclare-t-il.

Ce qui est très compliqué pour un maire de petit village, c’est la relation avec ses habitants. « Tout le monde se connaît et ce sont tous des amis. Alors quand il faut faire quelque chose qui ne plaît pas vraiment, c’est difficile… Je n’ai pas envie non plus de créer des tensions ».

Il l’affirme, il ne s’est pas déplu à la mairie, mais c’est un travail éprouvant. « Le maire à Esteil, il est très seul. Le Conseil municipal est comme une chambre d’écoute mais je n’ai pas de second. Il faut que je me débrouille dans tous les domaines », explique-t-il. Ses adjoints, pris par leurs activités et ne résidant pas à Esteil n’ont pas assez de temps pour remplir leurs fonctions à plein temps.

La solitude dans un village de cette taille est une fatalité. Les quelques tracteurs qui passent dans les rues de temps à autres ne parviennent pas à faire oublier que les poules, vaches, lapins et autres animaux de la campagne sont plus nombreux que les habitants humains sur la commune.

A voir maintenant si quelqu’un se dévouera pour candidater à la mairie ou si, dans le pire des cas, Esteil sera rattaché à une autre commune. Lors des deux dernières élections municipales (2008 et 2014), aucune commune n'est arrivée jusqu'à l'étape 4 : la fusion de communes. Esteil pourrait être la première depuis 2008.


Célia Couleaud


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