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  • Photo du rédacteurCélia Couleaud

The Phantom of the Opera : analyse

En cours d'"Archives Cinématographiques" (Master 1), j'ai étudié la restauration de films. J'ai réalisé un court dossier analysant un cas précis. Le film The Phantom of the Opera, version de 1925 et version de 1929.

Présentation

Le fantôme de l’Opéra est un roman de Gaston Leroux publié en 1910.

Il est adapté pour la première fois au cinéma aux Etats-Unis en 1925 par Rupert Julian. C’est cette adaptation-ci que je vais analyser par la suite grâce à l’enregistrement correspondant à ce qui a été diffusé lors de la première à New-York le 6 septembre 1925. Ce film a fait l’objet d’une restauration par Universal déjà quatre ans après sa sortie : en 1929. C’est cette restauration qui est devenue la version la plus répandue du film de Rupert Julian. Le film de 1925 est plus long (1h46 contre 1h34 en 1929).

Comparaison

Dès les premières secondes, des différences sont visibles. La colorimétrie change : de tons simplement noirs et blancs sur la version de 1925, les images passent à des tons colorés en 1929. La musique change également. La restauration s’accompagne de la huitième Symphonie en Si mineur de Franz Schubert tandis que la version de 1925 contient aussi la quatrième et quarantième symphonie de Mozart. Cependant, la version de 1925 que j’ai pu visionner a une grande partie de son film qui n’est accompagné d’aucune musique, notamment lors des scènes de panique ou lorsque la pression monte.


Avant la première scène, la version originale du film présente Gaston Leroux et son histoire en deux cartons qui n’apparaissent que plus tard et modifiés dans la version de 1929. Beaucoup de cartons, narratifs notamment, ont été retirés.


Dès la première scène, des différences apparaissent, caractéristiques de cette restauration du film. Nous y retrouvons un plan large sur l’acteur Lon Chaney. Il n’y a que dans la version de 1925 que l’on retrouve l’acteur en plan plus serré et bougeant les lèvres, tandis que la version de 1929 reste simplement sur le plan large qui dure plus longtemps. Cela s’explique par la situation de l’acteur à l’époque, qui n’a pas participé à la restauration car il était sous contrat exclusif avec l’entreprise de production et de distribution cinématographique MGM. Ces coupures reviennent tout le long du film.


Au-delà des retouches concernant ce personnage, certaines autres scènes ont été enlevées et d’autres ajoutées entre les deux versions. De manière général, la version de 1929 enlève à sa version originale un grand nombre de scènes clés, et l’histoire est raconté à travers les cartons qui changent et sont plus longs. Des scènes entières de spectacle sont changées, que ce soit pour le ballet ou pour l’opéra :

  • Parmi ces scènes coupées nous retrouvons la discussion à l’entrée de l’opéra, présente uniquement dans le film de 1925. Durant le ballet, le changement des scènes influe sur toute l’histoire. L’accent est mis sur la nomination des nouveaux directeurs de l’Opera dans la version de 1929, puis l’enquête sur le fantôme ; alors que le film de 1925 valorise avant cela le point de vue de la chanteuse Christine Daaé. Il n’est d’ailleurs pas inintéressant de noter qu’il y a à ce moment-là une scène de baiser entre Christine et Raoul que nous ne retrouvons que dans la version de 1925, ce phénomène se reproduit plus tard dans le film et est encore une fois effacé de la version de 1929. La relation qu’entretien Christine avec le fantôme est également d’avantage développée dans la première version. Contrairement à la version de 1929, on la voit interagir avec lui plus souvent, même en présence de Raoul. Dans la version de 1925, l’enquête sur le fantôme de l’Opéra, elle, ne vient qu’après.

  • Après que Christine ait chanté, la version de 1929 omet la scène où l’on entre dans l’intimité de Christine : elle est évanouie, et portée jusqu’à sa loge. Le scénario et la situation des personnages est alors, à de nombreuses reprises, totalement modifié dans la restauration. Ainsi avec l’exemple précédent, le spectateur de 1929 n’a pas la vision de l’envers du décor ni de Christine fatiguée. Le spectateur la voit alors directement accueillir Raoul avec une grande joie et beaucoup d’énergie.

  • La scène où le machiniste retrouve une personne pendue est déplacée dans la version de 1929 : du début, elle passe alors vers la fin du film, avant que Christine et Raoul tentent de s’échapper après le spectacle. Par ce geste, le Fantôme n’est pas présenté de la même manière dans les deux versions. Le spectateur de la version de 1925 est tout de suite au fait des évènements mortels qui se déroulent dans l’Opéra, et se méfie donc d’avantage du Fantôme ; tandis que les spectateurs de la version de 1929 prennent connaissance de cet évènement qu’après avoir réellement découvert le Fantôme.

  • Après la disparition de Christine Daaé, la version de 1925 montre Raoul inquiet, allant voir la police pour dénoncer le Fantôme. Ce qui disparait totalement dans la restauration du film. Encore une fois, la suppression de cette scène altère encore un peu la proximité que peut ressentir le spectateur avec les personnages.

  • La dernière scène disparait également de la version restaurée de 1929. Elle montre Raoul et Christine en Lune de Miel. La restauration s’achève donc sur la mort du Fantôme.

Dans la restauration de 1929, les scènes ont fait l’objet d’un travail sur la couleur. Ainsi, certaines scènes sont simplement teintées dans des tons jaunes, bleus ou encore rouge. D’autres scènes bien particulières ont totalement été colorisées. C’est le cas de toute la séquence du bal masqué. La scène est présentée comme « à part » dans la narration dès 1925, mais la version de 1929 donne encore plus d’importance à cette

séquence en en faisant la seule colorisée. Pour l’époque, cela n’a pas pour objectif d’ajouter du réalisme à la scène, mais au contraire plutôt une sorte de fantaisie. La scène semble irréelle, tirée du fantastique. Cette colorisation permet aussi de faire ressortir le Fantôme et son costume rouge du reste de la foule.



D’une manière générale, la qualité et le contraste de l’image ont été nettement améliorés dans la version de 1929.

Plus que de la restauration, certaines scènes ont été refaites ou totalement changées :























Avis personnel

Après de longues recherches sur les films restaurés, j’ai trouvé intéressant d’analyser The Phantom of the Opera pour la multitude d’éléments qui changeaient d’une version à l’autre, tout en sachant que seulement quatre ans les séparaient.


J’ai été surprise de voir comment certaines choses changent un film du tout au tout. Ce qui m’a marqué en premier lieu est la musique. Les deux bandes son sont très différentes et donnent deux ambiances elles aussi très différentes. J’ai aussi été surprise par la diversité de séquences tournées. Pour une même scène, les deux versions n’utilisent pas forcément les mêmes plans, mais se retrouvent sur la même histoire, avec les mêmes personnages, etc.


Je n’avais jusqu’alors jamais analysé deux versions d’un film muet. Ce qui m’a marqué est aussi la maniabilité de ce genre de films. En changeant certaines scènes, certains points de vue et surtout certaines paroles et cartons, une restauration peut totalement changer le propos du film original. Bien plus qu’on ne pourrait le faire avec un film parlant.


La restauration étant d’Universal, le producteur même du film de 1925, je me demande quelle ont été leurs limites dans les modifications afin de respecter le film. Parfois, je trouve que la version de 1929 n’est pas du tout fidèle à l’originale, elle ne respecte plus le scénario et change même certains personnages.


Pour moi, la version de 1925 est plus « vivante » que sa restauration et plus émouvante. Elle n’est pas colorisée mais la différence de plans, l’importance du point de vue de la chanteuse et du développement de ses sentiments ainsi que la présence plus importante de dialogues permet au spectateur de se sentir plus concerné et plus intégré à l’histoire. Dans la version de 1925, je trouve que le spectateur peut d’avantage comprendre le dilemme que traverse la chanteuse et l’amour qu’elle éprouve pour Raoul. Au niveau de la technique et de l’artistique, la version de 1925 présente des scènes très intéressantes, qui n’ont malheureusement pas été conservées dans la version de 1929. Comme les scènes de jeux d’ombres par exemple.


Je trouve intéressante à analyser la façon dont les images de 1929 sont colorisées, chaque couleur représentant une scène ; mais je ne pense pas que l’intérêt soit très important. La colorisation de la séquence du bal masqué donne, cependant, à la scène un rôle particulier et la distingue des autres. J’ai trouvé cette utilisation de la couleur très judicieuse ; cela donne du sens. La scène du bal est en effet la scène la plus spectaculaire, tant grâce à la quantité de personnes figurantes, que par les costumes. Cela m’a fait l’impression que la séquence se plaçait hors de la temporalité du film, tout en étant un élément clé mis en valeur pour la suite de la narration.


Pour ce qui est de la musique, je pense que le placement des musiques et des silences a été pensé dans la version originale, alors que, dans la restauration, la musique dénote parfois de la scène qui se joue en même temps. Ceci est frappant par exemple lors de la scène où Christine s’évanouit à la découverte du lieu de vie du Fantôme : La musique est alors plus enjouée dans la version de 1929, alors que le thème principal, plus sombre, est joué dans la version de 1925, et ce à la suite d’un silence.


En conclusion, même si j’ai une préférence pour la première version, que je trouve plus cohérente, plus émouvante et plus facile à suivre ; je trouve que la restauration de ce film faite en 1929 est très intéressante à regarder et analyser. Je trouve incroyable toutes les modifications qui ont été apportées, tous les éléments changés, enlevés ou bien ajoutés en seulement quatre ans qui séparent les deux versions. Bien que moins simple au niveau du scénario, les essais techniques présents sur la version de 1929 améliorent remarquablement la qualité de l’image.


Célia Couleaud

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